Noir, c’est noir ! 22 juin 2018

Noir, c’est noir !…  
Une victoire, c’est une victoire !
Vesoul, le 22/06/2018

J’ai lu ce matin dans l’Humanité que « les cheminots avaient remporté une victoire d’étape ». Non, non et non, je ne m’habituerai jamais au fait que dans mon camp « on se raconte des histoires ». C’est censé nous remonter le moral, je crois surtout que c’est s’aveugler et perdre l’indispensable lucidité qui doit accompagner notre combat pour un monde plus humain. Ce n’est en rien ôter de sa valeur à la lutte exemplaire, tenace et intelligente des cheminots, que constater que l’état du rapport de force général entre les classes ne leur a pas permis de sauver leur statut et de garantir l’avenir de la SNCF.

Je n’en peux plus d’entendre dans mes réunions syndicales : « la colère monte », « les luttes s’étendent »… Depuis qu’elle monte, elle aurait dû éclater ! Depuis qu’elles s’étendent, elles ne devraient pas tarder à se généraliser… Mais il n’en   est rien, c’est même tout le contraire. Ce sont nos adversaires, avec en tête ce « gouvernement de guerre de classe », qui avancent.

L’éditorialiste du n°3 de « Cause commune » (la revue du PCF) écrit «2017 nous a laissé un goût de cendres …….. un homme, une femme de moins de 50 ans n’a jamais participé, en France à une grande lutte victorieuse… et combien a-t-’il connu de défaites ? ». Quelques lignes après, il constate que comme il faut remonter en 1968, il pourrait rajouter 10 ans d’âge pour trouver un participant à cette lutte. Il précise qu’au niveau européen il y a eu la victoire de la Révolution des oeillets au Portugal (1974). En France, je crois que l’effet propulsif des victoires des travailleurs et de la jeunesse en 1968 s’est fait sentir jusqu’à la victoire électorale de 1981. Parce que ce fut bien une victoire, quoiqu’en pensent « des » camarades du PCF (surtout en Haute-Saône). C’est parce que nous n’avons pas su transformer cette victoire en luttes que dès 1983 la contre-révolution libérale s’est remise en route. J’avais 30 ans en 1981, je suis donc comptable du bilan des mois qui ont suivi, je voudrais sur ce site contribuer à la réflexion sur les causes multiples de nos échecs, sur les erreurs que nous avons faites les uns ou/et les autres.

Nos adversaires ne sont pas cachotiers, ils ont affiché leur but, casser les acquis révolutionnaires de 1945, en finir avec les compromis des « trente glorieuses »… en résumé et en clair, nous faire travailler plus, nous exploiter plus. De notre côté, au lieu d’une pâle copie de la chanson de la marquise : « tout ira mieux demain, si vous votez bien », il nous faut indiquer le chemin des luttes et redonner des couleurs à notre espérance, parce que le chemin est long et difficile.

Une victoire, c’est une victoire !
Vous aurez compris que je ne souhaite pas prendre la moitié d’une défaite pour une victoire, raison de plus pour mettre en avant les luttes victorieuses, trop rares, par les temps qui courent.

Il y a eu la longue lutte de l’Ephad des Opalines dans le Jura, qui a ouvert le débat sur le sort réservé à nos anciens les plus fragilisés, nous devons tout faire pour que ce débat ne se referme pas et pour que nous ne nous contentions pas des maigres avancées lâchées par ce gouvernement.

Il y a quelques jours ce fut le tour du personnel de l’hôpital psychiatrique du Rouvray, en Seine-Maritime, de remporter une victoire à la fois substantielle et d’une forte portée symbolique. Près de 3 mois de mobilisation, pour certains, 18 jours de grève de la faim, ils ont résisté au « silence de mort » de l’ARS, ils ont tenu bon, ils ont pu compter sur le soutien de malades, de membres de leurs familles, de salariés en lutte dans d’autres secteurs (notamment les cheminots). Ils réclamaient 52 postes, ils en ont obtenu trente, ils ont aussi obtenu la création d’une unité pour jeunes malades, avec les créations de postes qui vont avec, et une unité spécialement aménagée pour personnes incarcérées (USHA). Je vous renvoie aux articles de l’Humanité ou de Politis. Cette victoire montre le chemin pour les autres luttes nécessaires dans le secteur psychiatrique, mais aussi dans l’ensemble du secteur hospitalier. Ici, il me faut saluer le travail fait par la Convergence nationale des Collectifs de défense et de développement des services publics qui organise demain un rassemblement à Paris.

Redonner des couleurs à l’espérance !
Un des grévistes du Rouvray déclarait à l’heure du premier bilan : «Cela commence à bouger ailleurs, c’est une bonne nouvelle, car finalement nous ne nous sommes pas battus uniquement pour des moyens, mais aussi pour une certaine idée de la société et du service public hospitalier.» C’est avec une telle visée, celle  d’une société plus humaine, où l’on prend soin des humains et où la règle devient petit à petit, conquête après conquête, « l’humain d’abord » que nous redonnerons des couleurs à notre espérance.  Cette visée elle a à voir avec l’utopie, parce qu’elle refuse d’accepter que ce qui est soit la seule réalité, le possible existe déjà, à nous de le faire vivre. Cette visée, nous autres les communistes, au PCF ou dehors, nous l’appelons communiste, parce que nous pensons qu’un autre monde est possible. Rien ne nous est promis, mais nous voulons prendre place dans la longue chaîne humaine qui n’accepte pas l’injustice de la société organisée par le capitalisme.


JJA