Prendre partie,… prendre à partie… prendre « parti » 19/09/2019.

Prendre partie, prendre le parti de, prendre à partie,
adhérer à un parti, adhérer au Parti… prendre un « parti ».
le 19/9/2019

Grammaire, vocabulaire et orthographe de la Politique.

Partons de deux a priori : nous sommes, mes lecteurs et moi, pour la démocratie, soit le pouvoir du peuple ; nous reconnaissons aussi les mêmes droits à tous les individus qui composent le peuple. À l’échelle d’un pays, le peuple se confond avec la nation. Deux questions à régler : qui composent le peuple ? les nationaux ou les résidents… ; recherche de l’intérêt général national ou de l’intérêt général humain ?

Pour que le peuple prenne le pouvoir, les individus doivent prendre partie, participer aux débats et aux décisions. Encore faut-il que leurs droits d’information, d’expression et de réunions soient respectés. Ce n’est pas une mince affaire, nous ne la traiterons pas ici. Nous ne voulons ici que souligner que la démocratie exige l’activité individuelle, une forme minimum d’engagement dans les débats, au moins l’écoute, l’expression. La démocratie exige d’eux qu’ils prennent partie et participent à la décision : le vote, on n’a pas trouvé mieux, je crains même que le vote électronique ne participe à la déshumanisation en cours de diverses activités… « humaines ».
L’organisation du pays, de chacune de ses institutions (territoires, services) nécessite des représentations, des délégations. Le premier niveau de participation à cette deuxième phase de la vie démocratique est le fait de prendre le parti de celui qui parle, celui qui est désigné, celui que j’élis… la disparition du « e » à « parti« , signifie que je ne suis plus une partie de la décision, mais que je me range derrière quelqu’un.
Au niveau suivant il appartient à chacun de prendre à partie les représentants pour ne pas les laisser seuls avec leurs responsabilités et pour assurer le suivi par chacun de l’application des décisions. Retour du « e« , l’individu en exerçant ce droit d’interpellation est partie prenante de la vie du pays, mais pour que sa voix puisse être entendue il doit disposer du droit d’expression, de moyens d’expression. C’est là que les « corps intermédiaires » jouent un rôle essentiel : les syndicats d’abord, les associations, les assemblées et regroupements informelles ou institutionnalisés. Le droit de manifester est constitutif de ce droit de prendre à partie. La prise à partie, ne doit pas être confondue avec la volonté d’en « découdre », mais la véhémence n’en est pas exclue si nécessaire.
Pour s’organiser à l’échelle du pays la démocratie, à ce niveau démocratie et république sont synonymes, repose sur l’existence de partis qui sont seuls à pouvoir présenter des candidats à toutes les élections et peuvent disposer de moyens d’organisation et d’expression. L’individu pour participer à la vie démocratique du pays peut adhérer à un parti. Il s’inscrit de la sorte dans une continuité tant du point de vue du passé que de la participation à la réflexion entre les élections, il acquiert des droits, notamment celui de choisir les candidats. L’adhésion suppose l’acquittement d’une cotisation, nous verrons plus loin l’importance de celle-ci.
Seulement voilà, même avec la volonté d’agir, l’offre, les partis existants, peut ne pas convenir. Pourtant nous bénéficions, dans notre pays, d’une chance on ne nous propose pas d’adhérer au Parti, le seul, l’unique celui qui s’écrit avec un grand P. Il y a des scories de ce refus du pluralisme, dans l’idée du Parti de la classe ouvrière, ou encore du Mouvement du peuple. D’abord aucun « parti » ne saurait s’accaparer la représentation d’une classe, encore moins du peuple. Ensuite aucun parti ne peut être socialement homogène, tout parti recompose en son sein une alliance de classe. Comme l’explique si bien Jacques Bidet, tout au long de ses travaux, il y a deux facteurs de domination, l’économie et la compétence. Un parti, aussi révolutionnaire soit-il, doit faire avec la diversité sociale et ses conséquences, ainsi qu’avec la division du travail qui s’appuie sur les différences de capital symbolique et que seul un long et acharné travail de formation peut relativiser.

Si malgré tout, rien ne vous convient, je ne dis pas si rien n’est parfait, il vous reste une possibilité que je recouperais en une seule expression prendre « parti« . Pas seulement en choisir un, mais décider de le prendre, de le faire sien, d’y prendre le pouvoir. Ici je mets des guillemets à « parti » pour distinguer ma proposition de celle de la simple prise de position, je parle ici de prendre, de s’emparer d’un parti politique. De mon point de vue, mieux vaut partir de l’existant, viser à le transformer avec d’autres, si vous pensez nécessaire d’en créer un nouveau par scission, regroupement ou ex nihilo, allez-y !

Devant ce choix qui peut être le votre je voudrais vous mettre en garde : un « parti » ce n’est pas un Mouvement. Mouvement, ? ça bouge, c’est plus entraînant, c’est censé être plus large. Mais le côté informel, qui séduit beaucoup, est une tare congénitale insurmontable, si ce n’est par la transformation en un parti, comme les autres. Alors pourquoi ne pas en faire une étape vers un nouveau « parti » ? Parce que j’ai acquis la conviction tout au long de ma vie politique, que les tares congénitales laisseront des traces trop graves, si ce n’est mortelles. De quelles tares je parle ? Le côté informel et souple, accompagné le plus souvent par la suppression du droit d’entrée, la cotisation, laisse dans l’ombre à la fois la question financière et celle du pouvoir. Toujours un petit groupe de personnes autour d’un leader, charismatique ou pas, monopolise réellement la caisse et les pouvoirs. Les mécanismes de décisions sont opaques et il n’y a pas de règles connues et écrites de fonctionnement. Le moment des élections venu il faudra bien formaliser des structures partisanes pour s’inscrire dans le processus électoral (la constitution connait les partis, pas les mouvements) et ces structures parallèles au mouvement ne seront pas transparentes pour ceux qui se reconnaissent dans le mouvement. Aujourd’hui, trois Mouvements se sont fait une place dans la vie politique du pays : la France Insoumise de Mélenchon, la République en Marche de Macron et Génération·s d’Hamon. Chacun s’identifie à un leader. Les deux premiers illustrent jusqu’à la caricature ce que j’écris ci-dessus. Pour Génération·s j’ai cru qu’ils allaient plus vite vers une structuration de type parti classique, peut-être à cause du moindre succès, mais on me dit que des choix comme celui de la possible multiplicité de structures pour un même territoire, contredisent ma première appréciation.

L’avenir se conjugue au présent,
à la première personne du singulier
et à la première personne du pluriel.

Même pour vous, mes semblables, les vieux.


Ne vous contentez pas de manifester pour vos retraites avec vos syndicats, participez à la construction d’une alternative politique, vous avez votre rôle à jouer dans les réflexions en cours

Avant de regarder résolument devant, je voudrais affronter le discours dominant à gauche, comme à droite (mais à droite, c’est pas mon affaire, je n’ai parlé de LREM que pour illustrer mon propos) : les vieux partis sont moribonds, les partis sont nécessairement corrompus, coupés de la vraie vie des vrais gens, etc… C’est vrai et c’est faux. Je voudrais juste à ce moment de ma réflexion partager avec vous une expérience. En 2005, inorganisé, le PCF du 70 pas pressé de me compter dans ses rangs, je me tournais vers la structure interne/externe au PS, le PRS (Pour la République Sociale) lancée par Mélenchon, mes nouveaux camarades ont tout fait pour me faire adhérer au PS à Vesoul. Pendant plus de deux ans j’ai donc connu de l’intérieur le PS… Croyez moi je fus estomaqué de constater que les adhérents et militant de base de ce parti ressemblaient beaucoup à mes camarades « gauchistes » ou/et communistes, que j’avais quitté quelques années auparavant. Mes paroles d’ancien trostkistes étaient bien reçues par certains. Près de 40 ans de sectarisme s’effondraient avec cette expérience. Rien n’est jamais figé, ni fini.

Il faut que ça bouge à gauche, il faut réinvestir, investir les partis existants. Je me rappelle de beaux appels en ce sens de Jacques Généreux au début des années 2000. Alors, pour me montrer à la hauteur de son message de l’époque, ne pas camper sur une position sectaire, je corrige : il faut investir les partis et mouvements existants. Il faut les faire dialoguer ensemble et construire rapidement une alternative à Macron et à l’Extrême droite. Les partis, dont le mien le PCF, ont besoin de sang et de cervelles neuves, vous les femmes vous avez un rôle essentiel à jouer, vos luttes, vos douleurs et vos victoires doivent avoir des prolongements politiques et donc transformer les partis et mouvements existants. Vous les jeunes, nous les vieux, avons aussi à faire valoir nos luttes et points de vue spécifiques. Il faudrait faire aussi que nos partis prennent de la couleur, le mâle, hétéro, blanc est un peu trop dominant, même dans les partis de gauche, surtout dans les partis de gauche… parce que là, c’est intolérable.

À suivre, mais peut-être pas Jeudi prochain, pour cause d’opération de la cataracte.

JJA