Il nous faudrait être subversif 20/05/2021

IL NOUS FAUDRAIT ÊTRE SUBVERSIFS  20/05/2021

Le nous d’où je parle, c’est la gauche de ce pays. Pour une définition de ce ce qu’est la gauche, je me réfère aux « 7 principes pour refonder la gauche » que j’ai publié le 21/10/2017 sur mon blog. Personne n’a jamais fait la critique de ce texte, ou fait des propositions pour l’amender. Je crois, en fait, qu’à moins d’abandonner la notion de gauche, avec tous les effets que cet abandon peut avoir et a déjà eu, ces principes sont indépassables et indémodables. Il y a nécessité de constituer un camp, donc des alliances ; de construire une majorité ; de faire notre et de corriger la devise républicaine ;

de veiller au pluralisme au sein de notre camp et dans chacune de ses composantes ; de toujours rechercher l’unité ; de toujours prioriser l’humain  ; de préserver notre éco-système.  

Plein de raisons peuvent expliquer la navigation à vue à laquelle se livrent organisations et citoyens qui devraient constituer cette gauche d’aujourd’hui. Cette gauche qui devrait avoir comme objectif de se reconstruire autour des objectifs du moment politique que nous traversons. Au lieu de cela beaucoup passent leur temps à se disputer autour des problèmes d’hier. Je crois que la principale raison de l’absence de boussole est l’apathie intellectuelle provoquée par 40 années de défaites de notre camps. Le « paysage politique », comme disent les commentateurs, est ravagé, c’est la politique qui est déconsidérée. Pour la droite ce n’est pas grave, elle a dans ses mains tous les leviers pour diriger le pays comme elle le souhaite, c’est à dire au profit du capital et des riches. À gauche, c’est catastrophique. C’est nous qui avons besoins de partis, d’organisations, pour nous défendre, pour nous former, pour discuter et réfléchir, pour bâtir des rêves mobilisateurs.

Il n’y a pas que la gauche qui soit en mauvais état, c’est notre pays qui l’est (cf. mon billet du 6/05), au milieu d’un monde tout autant ravagé par les inégalités et la gestion irresponsable des gouvernants et des capitalistes. Mais notre tâche à nous, c’est de reconstruire, déjà dans notre pays, les conditions d’une respiration politique, les conditions d’un débat démocratique et d’une alternance politique (pour l’alternative, ce sera plus long et plus dur, j’y reviendrai). 

De Gaulle nous a légué un régime présidentiel, renforcé par l’instauration du quinquennat qui place les législatives après l’élection présidentielle. Ainsi tous les 5 ans, nous élisons un monarque, que la subordination du parlement dispense d’avoir à constituer une majorité autour de débats réels au parlement. Ainsi nous vivons de coup d’état démocratique en coup d’état démocratique. Avec le hold-up de Macron sur la vie politique de ce pays, nous avons atteint le fond. Nous avons un président sans parti digne de ce nom, sans personnel politique à la hauteur, qui pendant la crise sanitaire, économique et politique que nous vivons fait vivre à ce pays une dangereuse aventure sous sa houlette peu éclairée.

Il y aurait nécessité et urgence à bâtir les conditions de l’alternance et d’un changement réel. À gauche, je ne vois rien de concret venir et nous ne disposons sans doute plus du temps nécessaire pour construire une majorité d’ici à l’élection présidentielle. Certains ont voulu faire le parallèle avec 1981, mais à l’époque il y avait un PCF d’une force incomparable avec celui d’aujourd’hui, un PS en reconstruction, des années de mobilisations autour du Programme commun, une extrême gauche non négligeable, une CGT très forte et une unité syndicale avancée avec la CFDT… Rien à voir avec le champ de ruine dans lequel nous devons nous débattre et, malgré tout cela, nous n’avons pas tenu trois ans.

Sommes-nous pour autant condamner à la patience impuissante, alors que les crises qui accablent notre pays, notre planète rendent urgents de mettre en oeuvre des solutions autres que symboliques et anecdotiques ? Les adeptes des petits gestes pour la planète et de l’aumône sociale sont nos adversaires (à ne pas confondre avec nos ennemis) les plus dangereux. Ils favorisent l’inoculation du poison de la dépolitisation. Il nous faut avoir de l’ambition, rêver en grand, faire preuve d’imagination.

UNE SEULE SOLUTION, LA SUBVERSION… 
DES INSTITUTIONS

Comme je ne suis pas complètement mégalomane, j’ utilise un conditionnel obligé. J’ai bien conscience que mon influence est proche de zéro, mais bon personne ne peut m’interdire de rêver et de causer avec vous qui avez la bienveillance de me lire. Si certain·e·s ont une idée d’un, d’autres moyens pour moi de participer au débat démocratique, de « lieux » ou le débat existe, je suis preneur. Pour l’heure voici mes rêves politiques.

Il nous faudrait ruser avec le jeu politique officiel dans lequel on veut nous enfermer. La première des nécessités serait de « déconsidérer » l’élection présidentielle. Tous ceux qui, à gauche, s’empressent de mettre en avant leur candidature, qui sont pressés de dire « je », qui mettent en avant leur programme, contribuent à légitimer cette élection et le rôle prééminent du président. Non, mes camarades du PCF, il n’est pas indispensable de participer à cette élection pour exister. Non, mes camarades de la France insoumise, le programme n’est pas une prérogative du candidat à cette élection. Non, monsieur Jadot, il n’était ni nécessaire, ni utile, de court-circuiter votre « parti » pour mettre en avant votre candidature…

Au soir du résultat du deuxième tour, je voudrais entendre autre chose que « Le roi est mort, vive le roi ». Je voudrais que l’élu·e nous dise : « maintenant il vous reste à effectuer votre choix essentiel, celui de vos représentants, je ne veux pas peser sur ce choix, choisissez ceux qui portent et porteront vos valeurs, vos priorités. Pour la dernière fois votre choix sera faussée par l’absence d’une vraie proportionnelle, donc une de mes deux seules recommandations quant à votre choix, sera : choisissez des représentants qui s’engagent à voter un projet de loi pour une vraie proportionnelle. »

Le roi est mort, vive la chambre de vos députés.

Deuxième rêve. J’aimerais que « l’élu·e » déclare « puisqu’il me revient de désigner le/la premier·ère ministre, je lui demanderais d’indiquer que son premier projet de loi portera sur la fixation du « minimum social » au niveau du seuil de pauvreté (50% du revenu médian) en incluant dans ce dispositif les 18/25 ans. Ce sera donc ma deuxième recommandation quant à votre choix, choisissez des représentants qui s’engagent à voter cette mesure.

Le roi est mort, ce sont les plus vulnérables qui doivent être prioritaires.

Troisième rêve, je voudrais entendre l’élu·e nous dire : « puisque le parlement doit légiférer et le 1er ministre gouverner sous son contrôle, voilà les pouvoirs prévus par la constitution de la 5e république que je m’engage à ne pas utiliser. Pour mémoire, ce serait le parfait contrepied à la déclaration de J-L Mélenchon dans sa dernière émission TV à la veille de l’élection de 2017 : « j’utiliserais  tous les pouvoirs qui me sont impartis par la constitution… » Au cas improbable, où il parviendrait au deuxième tour de l’élection l’année prochaine, je souhaiterais une déclaration infirmant celle de 2017 pour lever mes réticences à voter pour lui.

Après mes rêves, je vais vous infliger mon cauchemar et vous proposer une manière de le combattre, si par malheur, bien (im)probable, il devenait réalité. Si, donc par malheur, nous devions avoir un deuxième tour Macron-Le Pen, je vous propose que nous fassions tous ensemble campagne pour le vote blanc, en annonçant aussi que nous ne voterons que pour des députés s’engageant à légaliser le vote blanc à l’avenir. Dès cette élection, la marée blanche ôterait toute légitimité au mal élu. J’entends les protestations des partisans du barrage à Le Pen, mais ne voyez-vous pas que de barrage en barrage vous ne faites pas reculer les idées nauséabondes ? Ne voyez-vous pas que la droite, dont Macron est un des représentants, reprend chacune des propositions de Mme Le Pen ? Le quinquennat qui vient de s’écouler a bien fait la démonstration qu’on ne pouvait servir « en même temps » deux maîtres : les riches ou les autres ? Le choix fut constant, ce fut les riches. Je fais partis de ceux·elles qui ont voté pour Macron au deuxième tour, il nous a enrôlé dans ses troupes en prétendant que nous avions voté pour son programme, on ne nous y reprendra pas.

Mais nous n’en sommes pas là, nous avons douze mois pour rêver et « prendre au sérieux nos rêves » (clin d’oeil à mes camarades, vous voyez je suis toujours Léniniste, je cite son « Que faire ») et j’ai une dernière suggestion pour subvertir la mascarade que sont les élections présidentielles. Il y a une candidate potentielle, qui ne s’est pas précipitée, qui ne veut pas jouer solo, qui n’a pas brandi un programme, et qui a su souvent être la porte parole des dominé·e·s, vous me voyez venir, je parle de Madame Christiane Taubira. Voilà une candidature qui aurait « de la gueule », avec elle pas de risque qu’elle se prenne pour De Gaulle, ni pour la cheffe d’une majorité monolithique.

Nous sommes quelques dizaines de milliers de citoyens à avoir signé une pétition pour lui demander d’être candidate, rejoignez-nous signer la pétition en suivant le lien ci-dessous. 

Et surtout n’oubliez pas de penser, prenez la parole partout où cela est possible pour démontrer que rien n’est joué d’avance, l’avenir c’est notre affaire.